Trail : quel renforcement musculaire ?

L’entraînement en course n’est pas toujours suffisant pour se préparer aux contraintes d'un trail, surtout pour les coureurs des plaines. Il est donc important pour tout traileur de prévoir des séances de renforcement musculaire. Explications avec Pascal Balducci.

coureur trail

Le trail est une discipline très exigeante sur le plan musculaire et la fatigue périphérique (musculaire) est un facteur limitant de la performance. Chacun a pu en faire la douloureuse expérience lors d’une épreuve qui dépassait ses capacités du moment. Les montées exigent une production de force qui croît avec la pente (au-delà de 15% de pente, les physiologistes estiment que le renvoi d’énergie élastique gratuite est nul) et les descentes impliquent un travail en excentrique (allongement des fibres musculaires) rapidement inflammatoire suite à la destruction du squelette protéique cellulaire.

Par conséquent, le renforcement musculaire devient un contenu d’entraînement quasi-incontournable. Ce renforcement concerne principalement les membres inférieurs mais il s’adresse également au tronc et aux membres supérieurs car la dynamique de foulée implique l’ensemble des chaînes musculaires.

Pour faire simple, le travail musculaire se fait selon deux régimes de contraction : anisométrique et isométrique.

  • Le premier régime indique que la cellule musculaire change de longueur : elle se raccourcit dans le cadre d’une contraction concentrique, elle s’allonge si la contraction est excentrique.
  • Le deuxième régime indique que la cellule conserve sa longueur : on parle de contraction isométrique, qui est à l’œuvre, par exemple, quand vous faîtes la chaise (position assise contre un mur).

Notons que le coureur qui évolue à plat met à l’œuvre ces 3 types de contraction : concentrique lors de la phase de poussée, excentrique lors de la phase d’appui, et isométrique lors de la phase de soutien. Puis comme nous l’avons dit, plus la pente est raide, plus la phase excentrique diminue, jusqu’à disparaître. C’est le contraire en descente où la phase concentrique est très courte et la phase excentrique très longue.

Il faut donc travailler avec trois modes de contraction lors d’une séance de renforcement et avec deux modalités de travail : au poids du corps ou avec charges. Si vous êtes débutant et si vous n’êtes pas encadré par un professionnel, je déconseille fortement le travail avec charges qui présente de nombreux risques. Idem pour le travail concentrique des abdominaux qui est souvent mal fait. De plus, ne mélangeons pas renforcement et développement de la masse musculaire.

Par conséquent, le travail de renforcement doit éviter :

– la prise de masse musculaire (hypertrophie), pénalisante dans la locomotion et dans le cycle étirement-raccourcissement.
– des modifications histologiques et enzymatiques, car la proportion élevée de fibres lentes caractéristique des athlètes endurants est synonyme d’une économie et d’un rendement énergétique meilleurs (Coyle et al., 1992).
– des altérations biomécaniques susceptibles d’entraîner une dégradation technique du geste sportif.

Alors comment faire ?

  • Fréquence des séances : 1 à 3 fois par semaine, entre 10 et 30mn.
  • Lieu: en extérieur ou en salle
  • Quand : couplé à la séance et/ou après la séance en post-fatigue et/ou déconnecté de la séance
  • Quels exercices : squats, squats jump, fentes, fentes accélérées, mountain climbers, burpees (pompe + squat jump), pompes normales ou à genoux pour les débutants, abdominaux et lombaires sous forme de gainage, saut à la corde, saut de bancs ou d’escaliers pieds joints, chaise.

Il est conseillé d’effectuer sa séance sous forme de circuit, c’est-à-dire une succession d’exercices avec un nombre de répétitions bien défini, et en variant les sollicitations ; ou si l’on veut mettre une touche de défi, on travaille à la durée ce qui signifie que l’on privilégie la justesse du geste à sa vitesse d’exécution.

Exemple 1 :

3 séries de (10 squats, 30s gainage abdominal, 5 pompes, 10 fentes, 30s gainage lombaire, 20s de saut à la corde) avec 15s de récupération entre chaque exercice et 2mn entre chaque série. Si on peut débuter la séance par du home trainer ou un léger footing de 10-15 mn, c’est parfait. Sinon, être très prudent sur les premières répétitions.

Exemple 2 :

3 x 3mn de (20s de squats, 10s récup, 20s de gainage abdominal, 10s de récup, 20s de pompes, 10s de récup)

Exemple 3 :

Séance d’endurance musculaire.
Faire une séance de VMA classique de type 10 x 400m avec 20 squats en guise de récupération. Le 1er 400m se court à 100% de la VMA, les autres le plus vite possible. Ainsi, l’athlète mime la variation des sollicitations musculaires en trail. On peut changer d’exercice après chaque 400m. Plus vous serez forts, plus la décroissance de vitesse entre la première répétition et les suivantes sera faible.

Pour un trailer de plaine, il est préférable de courir 45 mn puis de faire 15mn de renforcement, que de courir 1h en continu. Pour un trailer de montagne, le renforcement des membres inférieurs se fait de manière naturelle à l’entraînement, mais on peut renforcer avantageusement la ceinture pelvienne et les membres supérieurs.

6 réactions à cet article

  1. Bonjour,

    Merci pour cet article très itéressant, néanmoins pourriez-vous svp clarifier le point suivant. vous parlez de renforcement musculaire mais en évitant la prise de masse musculaire (hypertrophie). Comment est ce possible?

    merci d’avance

    Olivier

    Répondre
  2. Bonjour Olivier. L’hypertrophie (prise importante de masse musculaire) conduit irrémédiablement à une prise de poids dont l’effet serait négatif sur le coût énergétique de la locomotion. Si le renforcement musculaire est bien maîtrisé, la prise de masse musculaire se fait aux dépens de la masse grasse, sans modification de la masse de l’athlète. Il n’y a donc pas hypertrophie.

    Répondre
  3. @Olivier
    Pour avoir fait un peu de muscu dans ma jeunesse, je crois me souvenir que :
    * Pour prendre du poids et du volume musculaire :
    Privilégier les charges lourdes, poussées lentes, donc des fractions forcément courtes : par ex 10 x 10 développés-couchés pour les pecs
    * Pour des muscles secs et fins (donc légers)
    Charges faibles, poussées très toniques (rapides) répétées au moins 20 fois.
    Je pense que c’est à ce type d’exercice que fait allusion l’article.

    Répondre
  4. Bonjour et merci pour cet article !
    J’ai un bel escalier à côté de chez moi et j’ai lu sur un autre site de running ( https://www.running-addict.fr/conseil-running/renforcement-musculaire-en-course-a-pied-5-methodes/ ) que c’était un bon exercice pour le renforcement pour le running, est-ce que vous êtes d’accord aussi pour le trail ? Je me dis que ça doit aider dans les montées
    Merci

    Répondre
  5. Bonjour, oui les escaliers sont un excellent exercice de renforcement pour les traileurs, en continu ou en fractionné. La hauteur et la longueur des marches imposent un travail de force et d’endurance de force très intéressant. Ensuite, on peut jouer sur la fréquence pour travailler plus ou moins en force.

    Répondre
  6. Bonjour
    Je me suis mise au trail à 57 ans, cette année.. je viens d’en enchaîner 4 en 4 mois de 25, 29,12,et22. Les plus longs avec un déniv de 700 à 1500m. Je courais en club avant bien sûr donc à un rythme régulier de 2 à 3x semaine. Pour le dernier trail, je me suis sentie très fatiguée. Est ce que j’ai trop enchaîné ? 2eme question : est ce que 57 ans, ce n’est pas trop tard pour un sport que je trouve très exigeant ?

    Répondre

Réagissez